Choisir d'etre gay ?

mercredi, août 16, 2006

4 Cette solitude, qui n’est pas esseulement

Perceval est parti, non pas de ma vie mais de ma ville. Je dois apprendre à vivre avec lui au loin, comme je l’ai fait auparavant avec David et avec Tristan. Réapprendre la solitude du cœur, qui n’est pas l’esseulement. Ce dont je me libère le plus difficilement dans la tentation homosexuelle c’est de la peur de la solitude, toujours ressentie à un certain degré comme un abandon. C’est une vieille angoisse d’enfant. Quand j’étais petit, je faisais toujours le même cauchemar : je me réveillais un matin et l’appartement était totalement désert ; les miens étaient partis et m’avaient oublié derrière eux. A chaque fois je dois donc me remettre à apprivoiser ma solitude en découvrant qu’elle n’est pas esseulement, mais le recueillement indispensable pour se donner vraiment à ceux que l’on veut aimer.

Sans intériorité, donc sans solitude assumée, je ne vois pas pour moi de véritable amour d’amitié possible. Tout ce que la passion a de fusionnel, dans la pulsion physique et plus encore affective, menace l’amitié durable. Un tel désir a comme objet, non pas l’autre dans sa réalité personnelle, mais l’image que je m’en fais et à travers laquelle je cherche à coïncider avec un moi idéalisé. Image qui est donc idole. Sa poursuite est lourde de déceptions, d’implosions et de ruptures à venir. Seule l’acceptation de la part solitude que me réserve la vie peut m’en délivrer. Après les grandes eaux de l’amour d’amitié, il me faut apprendre à nouveau que la marée basse précède nécessairement la pleine mer. Seul le dépouillement et l’intériorité me permettront de me donner à nouveau en vérité. Il faut endurer cette part de désolation qui me libère de l’idolâtrie de moi-même pour me tourner vers la présence de l’Autre.

Entre temps j’ai laissé cette annonce dans une messagerie : « Y a-t-il quelqu’un ici qui ne cherche pas du sexe, mais qui désirerait partager avec un ami de la tendresse dans la communion du cœur ? ». Dans un tel lieu je sais que ce ne peut être qu’une bouteille à la mer. A preuve les réponses de ceux qui me contactent en n’ayant de toute évidence pas lu attentivement mon annonce ou pas voulu comprendre ce qu’elle disait. Ceux-là veulent à tout prix combler le vide sexuel de leur mois d’août. Je sais néanmoins que l’homme est plus assoiffé d’amour authentique que de plaisir. Quelques uns osent se l’avouer et me le dire. Cela donne parfois des échanges assez personnels par mail ou par chat. Mais comme il est difficile malgré tout de les convaincre de lâcher l’idole d’eux-mêmes qu’ils traquent à travers leur désir de fusion affective ! Ils sont comme des enfants agrippés à leur nounours, qu’ils veulent emmener à tout prix avec eux dans leur lit pour apaiser leur angoisse. Comment leur faire comprendre que seule la solitude acceptée et l’intériorité nous permettent de nous donner ensuite à un autre à partir de ce que nous avons de plus vrai et de plus personnel ?